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    Joël Auxenfans. "Les visages du bonheur partagé". 12 foulards imprimés à Lyon. 90 x 90 cm chaque. 1995.

     

     

     

    Joël Auxenfans. "Les blasons". Commande du Mobilier National pour le Conseil Économique et Social à Paris de 12 tapisseries de basse lisse réalisées à Aubusson dans douze ateliers différents. 1994.

     

     

     

    Joël Auxenfans. "Tuiles". Terres estampées puis émaillées, cuisson chez Maria Lucia De Mas, céramiste. Environ 40 x 15 x 3 cm chaque. Bologne. Italie. 1990. 

     

     

     

    Joël Auxenfans. "Petite tête". Porcelaine de Limoges. 7 x 5 x 5 cm. 1991.

     

     

     

     

    Joël Auxenfans. "Tuile plate". Terre blanche émaillée en blanc. 25 x 18 x 0,5 cm. 1989.

     

     

     

    Joël Auxenfans. "Matières tournées". 1996.

     

     

    Joël Auxenfans. "Arpentage onirique".  Sculptures en fonte. Parc de Nogent le Roi (Eure et Loir 28).1993.

     

     

    Joël Auxenfans. Affiche de l'exposition "L'arpentage onirique". 1993. 

     

     

     

    Joël Auxenfans. L'église de Gironville (28), atelier de 1988 à 2015.

     

     

     

    Joël Auxenfans. Atelier "La Quercia d'Oro", restauroute abandonné, à Riola di Vergato, province de Bologne, Italie. 1989-1990.

     

     

     

     

    Joël Auxenfans. "Nombres". Pigments, colle de peau et gouache sur toile. 120 x 90 cm. 1990.

     

     

     

     

     

     

    Joël Auxenfans. "Nombres". Pigments, colle de peau et gouache sur toile. 110 x 85 cm. 1990. 


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  • COMMUNIQUÉ: 

     

    Désolé de devoir faire face à l'invasion publicitaire de mes blogs, décidée par le site hébergeur Eklablog, et au discrédit occasionné auprès de mes lecteurs ou visiteurs présents, passés et à venir (et potentiels), j'adresse mes excuses à tous ceux qui m'ont accordé une attention, c'est-à-dire, environ 16 000 visites au total en cinq ans.  

    Voici la copie du message écrit dans l'urgence ce matin à Eklablog: 

     

    "J'ai reçu aujourd'hui vos contenus publicitaires pour lesquels vous m'avez averti hier. 

    Totalement en contradiction avec le contenu, la forme et l'éthique de mes quatre blogs, cette intrusion publicitaire agressive et débilitante ruine le projet qui anime mon travail artistique sur ces blogs. Je vous informe que je vais dans ces conditions scandaleuses devoir interrompre précipitamment mes quatre blogs, ce qui constitue pour moi la destruction pure et simple d'un gros travail accompli et d'une vitrine professionnelle.

    Vos choix unilatéraux d'introduire massivement des pubs agressives et impossibles à supprimer, constituent un préjudice, puisque cela dénature radicalement des années de travail et des centaines de pages et de photographies et dessins, qui va être anéanti et qui devra être recommencé entièrement ailleurs, dans des conditions qui consommeront un temps énorme, tandis que les blogs ainsi présentés criblés de pubs sont totalement discrédité dans le domaine - l'art contemporain et l'environnement - où j'exerce.

    Je considère qu'il y a rupture des conditions pour lesquelles je me suis engagé sur votre site. Je vais prendre un avocat et vous serez contactés prochainement. "

     

     


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    Comme une chapelle funéraire

    Joël Auxenfans. Objets d'un autre temps. Carton d'invitation à l'exposition "Retro-spettiva", à Bologne, galerie Enne Vu en mai 1998.

     

     

    Une exposition personnelle était en négociation avec le centre culturel Français de Bologne pour 1996. Elle devait être la deuxième après une première exposition en février 1992. Mais un contretemps avec le calendrier d’autres expositions obligea la directrice du centre à me proposer un partenariat avec une galerie privée du centre de Bologne, la galerie EnneVu (N.V.), du nom de sa directrice, Nicoletta Vignoli, fille du sculpteur  Farpi Vignoli.

    La substitution ne semblait pas un problème, sauf que le projet que j’avais conçu était dimensionné pour la salle du centre français, grande d’au moins 150 m2, tandis que la galerie NV avait 30 m2 au maximum.

    Autant dire qu’il se posait un problème d’espace d’expression non négligeable : faire passer 150 m2 d’exposition dans un espace de 30 m2. Un rétrécissement de cinq fois au moins !...

     

    Qu’à cela ne tienne, rien n’est impossible pour un artiste français !...

     

    En préparation de cette grande exposition à l’Institut français, j’avais peint quatre- vingt tableaux en un été, à mon atelier dans la Beauce, d’une manière héroïque. L’inconfort de cet endroit était en soi une épreuve. Je travaillais et résidais dans une église romane et gothique propriété d’un couple d’italien de Vénétie immigrés en France dans l’après guerre.

    Cette église désaffectée de 330 m2 et 11 mètres sous la voute en bois du 18ème siècle, sans eau courante, ni électricité, était un lieu d’épreuve et de bonheur. Dormant là et cohabitant avec les bêtes de la nuit (chauve-souris, chouettes, mulots et campagnols divers,…) dans cet endroit éminemment religieux, tout en me cuisinant le jour mes plats sur une gazinière en chantant à tue tête, seul, faisant mes besoins dans les champs bourrés des pesticides, me lavant au robinet du cimetière à la tombée du jour et ne me déplaçant alors qu’à bicyclette puisque j’avais, en outre, vendu ma voiture, je vivais là une vie d’ermite.

     

    Le transport des 80 châssis, toiles et matériel nécessaires à la préparation de ces tableaux, s’effectua d’ailleurs attachés par paquets de 6-10 avec des tendeurs sur mon porte bagages, traversant Paris, du 11ème arrondissement où j’habitais alors jusqu’à la gare Montparnasse, pour descendre du train à Dreux, et aussitôt pédaler jusqu’à mon atelier église. Cela nécessita plusieurs voyages, et plusieurs séjours, une bonne partie de l’été, en somme. Mes retours à Paris et ma traversée des quartiers entre gare Montparnasse et chez moi, en vélo, depuis ce lieu retiré, me faisait l’effet d’un retour à la vie réelle, alors que la vie que je menais dans ce palais spirituel perdu au milieu des champs de la Beauce, était quelque chose d’unique, d’introspectif, et m’obligeait à relativiser l’agitation urbaine et mondaine que je traversait toutefois émerveillé, chaque voyage retour, de pouvoir la croiser de nouveau.  

     

    Les tableaux transportés sur porte-bagage de bicyclette, on s’en doute, étaient petits, d’environ 40 cm de côté, carrés. Et la toile était en coton écru, l’enduction étant effectuée avec un mélange de colle de peau et de pigments que l’on appelle « terre » (prononcer « tèrré ») en italien. Le projet consistait à réduire le vocabulaire de signes végétaux et humains que je pratiquais depuis 1989 à deux signes superposés, des visages – un par tableau – et des touffes d’herbe ou de plante, une aussi par tableau, comme une confusion volontaire, assumée, entre la destinée d’une vie humaine et celle d’une simple plante.

     

    Les pigments utilisés, mélangés au bon dosage empirique de colle de peau, pouvaient selon les cas, produire un scintillement, une délicatesse tactile très précieuse, provenant de "poussière" fixée par la colle séchée. Au lieu d’être véhiculée et emprisonnée, dans le cas de la peinture à l’huile, dans une gangue de médium constituée principalement d’huile de lin, la peinture à la colle de peau produisait une fixation à sec de la couleur, qui pouvait alors rutiler et palpiter dans sa matérialité de poussière pigmentaire intacte, cristalline et organique à la fois.

     

    Ce matériau à la fois terrien et précieux me permettait une application à gestes amples à la brosse pour la première couche et au gros pinceau à lavis, parmi les plus gros qui existent, pour les deux interventions suivantes, le visage étant dessiné d’un trait de profil et la touffe d’herbe dessinée elle aussi d’une traite, en quelques gestes allant et venant sans détacher le pinceau de la toile.  Il est évident qu’à peindre ainsi en trois couches successives seulement, une grande quantité de tableaux pourraient naître. Le fait est que j’ai dû délibérément adapter la manière de peindre à la grande dimension pressentie de l’espace à décorer par mes peintures, lorsque je croyais encore que l’exposition se tiendrait dans la grande salle de l’Institut Français.

     

    Apprendre par la suite que malheureusement, cette exposition devrait finalement se tenir dans une pièce bas de plafond d’à peine plus de 25 mètres carrés, et, qui plus est, sombre fut un choc mais qui ne me découragea pas complètement. Je demandais les mesures de la pièce et réalisai un plan et des élévations précises, dessinées au « Rotring », stylo à épaisseur constante qui servait aux architectes dans les années quatre vingt. 

    Comme une chapelle funéraire

     

    Joël Auxenfans. Objets d'un autre temps. Dessin du projet de l'exposition "Retro-spettiva", à Bologne, galerie Enne Vu en mai 1998.

     

     

    À l’examen des dimensions, il s’avéra que miraculeusement, l’ensemble de mes quatre vingt tableaux pouvaient tenir ensemble serrés dans cette toute petite pièce ainsi qu’un panneau en bas relief de porcelaine comportant lui aussi 210 petits camées de profil visibles, en transparence, enfouis sous l’émail, vitrifiés.

     

    Comme une chapelle funéraire

    Joël Auxenfans. Objets d'un autre temps. Exposition à la Galerie Enne Vu, en partenariat avec le centre culturel français de Bologne. 80 toiles et un panneau en porcelaine de Limoges, en mai 1998.

     

    J’ai appelé l’exposition « Retro-spettiva », en français « rétro-spective », comme un regard non pas récapitulatif d'une oeuvre, mais constatant la dimension fugitive des existences. J’ai dessiné un document du carton d’invitation pour l’imprimeur, minutieusement (voir ci-dessus), en reprenant le motif qui servait de base à l’ensemble du projet : une superposition d’un profil et d’une plante.

    La variation sur ces quatre-vingt toiles de ces lignes uniques du pourtour de la tête opérant un glissement sur la diversité et les affinités de caractères des humains, qu’une constance de geste plus impérieux pour la plante semblait contredire, obligeait le regard à faire l’effort de voir cette silhouette fragile au travers de l’éclat puissant de la forme végétale.   

     

    Comme une chapelle funéraire

     

    Joël Auxenfans. Objets d'un autre temps. Exposition à la Galerie Enne Vu, en partenariat avec le centre culturel français de Bologne. 80 toiles et un panneau en porcelaine de Limoges, mai 1998.

     

    Autant reconnaître que cette variation avait un caractère funèbre, une sorte d’hommage mortuaire à la vie et au manque ressenti des humains, connus et inconnus, amenés à apparaître et à disparaître et rejoignant tant d’autres disparus avant eux dans le processus vivant de renouvellement des générations. En quoi le modèle végétal correspondait symboliquement à ce phénomène d’éternel recommencement. C’était une forme d’apparition souterraine, surgissant d’une source et retournant au profond de la terre.

    D’une vaste chapelle lumineuse comme pouvait être considérée la grande salle de l’institut français de Bologne, et peut-être la réplique de l’église d'époque ancienne, magnifique et délabrée où je peignait ces toiles, on passait dans cette petite galerie pittoresque, à l’obscurité d’une crypte, d’un mausolée collectif, compact, resserré, presque étouffant de présences - absences, de spectres...

    Et aussi il y avait quelque chose d’étrange dans ce va et vient entre la vie citadine (et Paris,... quelle Cité !) que je traversai depuis mon domicile en vélo et cette retraite quasi absolue dans cette église désaffectée. Désaffectée signifiant que des hommes  des femmes et des enfants, par centaines, s’étaient succédés sur les bancs de cette église depuis le moyen-âge, avant qu'à son tour ce lieu hautement fondateur de la vie d'une communauté villageoise ne sombre à son tour dans l'inaction, l'inutile, hormis d'accueillir en son sein un jeune artiste que la solitude parmi ces vestiges (la  remorque en bois peint, ornée d'un dais, du corbillard, était encore là, bâchée mais bien visible près de l'entrée que je franchissait à chaque entrée et sortie) n'effrayait pas trop.

     

    Comme une chapelle funéraire

    Joël Auxenfans. Objets d'un autre temps. Exposition à la Galerie Enne Vu, en partenariat avec le centre culturel français de Bologne. 80 toiles et un panneau en porcelaine de Limoges. Mai 1998

     

    Comme si les centaines de visages en général jeunes et séduisants, ces foules que je croisais dans mes traversées de Paris à bicyclette dans ces quartiers si vivants du boulevard Saint Germain, avec ses files d’attente devant les cinémas, les terrasses de café, les trottoirs débordant d’étudiants et d’étudiantes, se retrouvaient à l’état de traces souvenir, images rémanentes, sur les toiles que je peignais dans la solitude de cette retraite au fond du plateau beauceron. Expression d'un sentiment profond de vanité et de fugacité de l’existence et des plaisirs de la vie, remplacés bien vite par la disparition, l’absorption à nouveau dans le néant, souvenirs bien vite effacés parmi la multitude infinie des êtres amenés à, presque instantanément relativement au temps long, naître et mourir.   

     

    Le public a, le jour du vernissage, je me rappelle, senti cette oppression. Cette variation mélancolique était toutefois portée sur un mode de l’harmonie, c’est-à-dire que les rangées de tableaux, assemblées par séries de quatre, de même couleur de fond et de même couleurs de profil et de plante, générait un effet chromatique savant, les combinaisons de couleurs de chaque série dictant en quelque sorte la nécessité d’un contrepoint en d’autres couleurs dans la série suivante, décliné comme une fugue, ou comme les souffles d'une polyphonie d'orgue...

     

    Comme une chapelle funéraire

    Comme une chapelle funéraire

    Comme une chapelle funéraire

    Joël Auxenfans. Objets d'un autre temps. Exposition à la Galerie Enne Vu, en partenariat avec le centre culturel français de Bologne. 80 toiles et un panneau en porcelaine de Limoges, en mai 1998.

     

    Ainsi on peut dire que ce n’était pas sur chaque toile prise séparément que « s’arrêtait » le processus de la peinture mais sur le développement de la suite chromatique logique qui s’écoulait comme une mélodie, chaque combinaison en appelant une nouvelle,  ceci sans fixation sur un point unique mais au contraire sur la fluidité du processus de déductibilité intuitive et sensible des couleurs. D’où la fixation du geste sur un rapport constant de traces, constituées de l’application du fond, puis de la plante, puis enfin du visage.

     

    Comme souvent dans mes expériences d’expositions, c’est dans des conditions vraiment épiques et héroïques, que j’organisais, souvent la nuit dans ma chambre d’hôtel pour économiser les frais de séjour, les systèmes de fixation de ces dizaines de tableaux entre eux pour faciliter le montage de l’accrochage en un temps record et avec un minimum de rectifications ultimes. À y repenser, il y avait un effort inouï et surtout solitaire, à confectionner ces expositions sans grands moyens mais avec une envie de faire la démonstration d’un projet cohérent, obligé, comme ici, avec ce changement complet d’espace, de faire preuve d’une capacité d’adaptabilité phénoménale, qui fait presque à son insu partie du projet.

    C’était un peu du Simon Starling avant l’heure, cet artiste s’étant fait connaître dans les années 2000 et encore maintenant par une œuvre à travers laquelle c’est autant le récit de sa genèse que sa forme finale qui compte. Et il faut le dire, avec pertinence et éloquence.

     

    Le seul regret est de n’avoir justement, à l’époque, pas assez perçu peut-être et pas assez assumé à l’avance que cela – l’adaptation  à deux espaces possibles d’exposition –  était une partie prenante du projet artistique et de ses conditions d'apparition qui valait la peine d’être, elle aussi, mise en évidence et documentée au sein même de l’exposition. Peut-être procéder moins par héroïsme silencieux à subir  les conditions objectives d’expositions difficiles auxquelles j’avais à faire face, que, au contraire, objectiver ces conditions par une forme visible ou lisible, pour m'en défendre publiquement.

     

    Maintenant que des dizaines d’années bientôt (1996-2016, cela fait du temps écoulé !) sont passées sur ces toiles au retour d’Italie, dans des conditions de conservation assez problématiques, dans cette fameuse église qui les avait vues naître,  il me reste à décider dans leur état défraîchi, si je les garde ou les détruis. C’est cette question – aujourd’hui arrivée à maturité avec l’acquisition d’un lieu de stockage beaucoup  plus sain mais plus petit - qui m’a sans doute poussé aujourd’hui à mettre en ligne  ces images, sachant que jamais probablement l’opportunité d’une exposition nouvelle des ces travaux ne verra le jour. Et que ces toiles, pensées comme une ode funèbre, auront ainsi peut-être légitimité à retourner à l’oubli duquel cet été de travail un peu fou les avait fait sortir, pour quelques temps…  

     

     

     


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    Variation ovale

     

    Joël Auxenfans. Objets d'un autre temps. Variation ovale. Série de 80 tableaux peints à l'huile sur panneau. 18 x 42 cm. 1998.(Détail)

     

     

    En ces années fin quatre vingt dix, le climat spécifiquement français de l’art institutionnel préférait des œuvres savantes, distinguées, intellectuellement irréprochables, d’une provocation politiquement correcte à force d’être réitérée sans cesse, parfaitement professionnelles, et surtout agrémentées d’une dose mesurée de finesse conceptuelle autorisant les moyens les plus austères, les plus « trash » ou les plus technologiques de mise en œuvre.

     

    Procéder à l’inverse, en se gavant de peinture comme d’une jubilation sensuelle, et en organisant le travail à cette fin, avait forcément quelque chose de décalé envers le monde de l’art.

     

    Il est des appétits énormes. Je ne crois pas trop me tromper en disant que peindre quatre vingt tableaux à la suite  – après les avoir soigneusement fait découper (ils sont en panneau de contreplaqué), préparés, enduits, poncés et oints de sous-couches préparatoires –, relève de l’orgie de peinture.

     

    Ce nombre de quatre vingt tableaux m’apparaissait comme coïncidant à l’extension maximale d’un projet de peinture selon les moyens, l’espace, le temps à ma  disposition. Et aussi, il s’agissait d’une exploration méthodique qui avait besoin du nombre pour faire surgir des choses qui ne seraient pas venues sur une peinture concentrée sur un objet unique.

     

     

     

    Variation ovale

     

     

     Joël Auxenfans. Objets d'un autre temps. Variation ovale. Série de 80 tableaux peints à l'huile sur panneau. 18 x 42 cm. 1998. (Détail) 

     

     

    J’ai réalisé d’abord dix dessins qui seraient faciles à transposer sur différents supports.

    Les sujets des dessins appartenaient à un vocabulaire de références classiques de l’histoire de la peinture : la nature morte, le paysage, l’odalisque, la corrida, …Ils conjuguaient l’histoire de l’art qui m’habitait et des épisodes de mon histoire personnelle. S’appuyer sur un corpus suffisamment reconnaissable de types d’images permettait de varier, de jouer, de décliner.

     

    J’ai alors choisi de varier huit fois ces canevas. C’est-à-dire que chacun des dix dessins serait ré interpété huit fois de manière différente. Ce chiffre 8, sans épuiser le phénomène de variation, permettait de l’éprouver, autrement dit d’en expérimenter vraiment un certain nombre de possibilités, tout en y trouvant du plaisir. Je voulais montrer à travers ces huit variations qu’il est possible et agréable de varier un principe de base. De l’altérer, le modifier, comme une façon de faire vivre un processus vivant, étonnant sans cesse par ses nouvelles formes à partir d’un principe constant.

     

    Vous pouvez expérimenter ce phénomène en collectant les feuilles de chênes provenant d’arbres distincts. Il est particulièrement frappant de constater que certaines feuilles sont excessivement découpées, d’autres au contraire, sont très arrondies, compactes, avec une infinité de types de formes intermédiaires, toutes sans faute respectant à leur manière le type originel de « la feuille de chêne ».

     

     

     

    Variation ovale

     

     

    Variation ovale

     

    Joël Auxenfans. Objets d'un autre temps. Variation ovale. Série de 80 tableaux peints à l'huile sur panneau. 18 x 42 cm. 1998.(Détail)

     

    Cela peut être observé pareillement avec les feuilles d’acanthe : cette plante des parcs et jardins, présente des découpes d’une variété inépuisable. C’est d’ailleurs pour cela à mon avis qu’elle fut employée comme motif par excellence des sculptures des chapiteaux grecs corinthiens, puis par une longue tradition de l’architecture s’y référant. La feuille d’acanthe est à la fois une forme variante et le symbole même de la variance. On la retrouve par exemple sur la colonnade divinement sculptée du Palais des doges de Venise.

     

    On peut observer en effet que certaines de ces feuilles d’acanthe sont dessinées avec un contour exacerbé, vif, nerveux, fougueux, tandis que d’autres sont plus sobres, régulières, compactes, homogènes, mais toutes sans exception, correspondent et respectent le type de la feuille d’acanthe.

     

    Variation ovale

     

    Variation ovale

     

    Joël Auxenfans. Objets d'un autre temps. Variation ovale. Série de 80 tableaux peints à l'huile sur panneau. 18 x 42 cm. 1998. (Détail)

     

    Un peu comme la variété considérable des caractères typographiques alphabétiques des différentes polices de lettres d’imprimerie reste prise dans le respect le plus absolu de la lisibilité impérative de chaque caractère au regard de la lettre que chacun d’eux dessine.

     

    Je ne parle pas évidemment des humains, qui obéissent à la même variation infinie des formes et des types, tous ses types s’inscrivant dans le caractère morphologique de l’humain. Cette variabilité a quelque chose de fascinant, et en même temps de jubilatoire, on y éprouve, on y saisit la vie, la vitalité, l’ivresse du vivant.

     

    C’est en partie pour interroger ce phénomène que plusieurs de mes recherches,  dans les années quatre vingt dix, ont cherché  à pratiquer un mode opératoire du multiple, qu’autorisent certaines techniques de reproduction telles que moulage, impression.

     

    Cette méthodologie du multiple n’est pas adoptée pour accumuler la même « marchandise  clonée », comme c’est souvent le cas dans un procès de production marchand dans lequel on cherche à réduire les coûts de création originelle, amortie par une multitude de copies.

     

    Disons que d’avoir des copies identiques provenant d’un tirage mécanique présente en effet plusieurs intérêts pratiques ou économiques : celui de ne pas avoir peur de perdre un exemplaire unique, de pouvoir être « généreux » et en donner à droite et à gauche sans se sentir totalement dépossédé, d’en vendre beaucoup, celui de pouvoir garder des archives, celui de pouvoir en avoir un usage qui prolonge le travail initial, par des collages d’affiches par exemple, comme je l’ai pratiqué ces dernières années.

     

    Mais ici, dans ce travail sur les ovales, il ne s’agit pas de tirage mécanique, puisque les tableaux sont chacun uniques, mais, même uniques, ils participent d’un processus de répétition. En répétant, on peut sentir rapidement, au sein du geste de répéter et les sensations qu’il entraine, une lassitude qui engendre à son tour une envie irrépressible  de rompre la répétition, d’éprouver la liberté de créer à nouveau au sein du « Même ».

    Je dirai même que répéter provoque immanquablement une accumulation du besoin de réagir à l'expérience antérieure, réarma à chaque fois l'envie de faire le contrepoint de ce qui était posé juste auparavant. Il y a des mécanisme compensatoires qui impulsent dans l'intuition l'envie de rompre l'état acquis pour lui opposer un autre état, une autre version possible, comme une réactivation virulente de la possibilité à s'opposer à l'état existant, pour lui en substituer une autre forme, née de la réaction à celle qui la précédait, comme une contestation intergénérationnelle entre les phases de peinture des tableaux. 

     

     

    Variation ovale

     

    Variation ovale

     

     

     Joël Auxenfans. Objets d'un autre temps. Variation ovale. Série de 80 tableaux peints à l'huile sur panneau. 18 x 42 cm. 1998. (Détail)

     

     

    C’est donc un processus choisi au sein d’une délimitation, qui permet de cultiver et de mesurer la liberté de changer. Liberté de changer qui semble ainsi pouvoir apparaître au mieux au sein d’un dispositif méthodique et apparemment clos. Cela s’apparente à la session de jazz ou de blues, très construite, à l’intérieur de laquelle se déploie une improvisation. Le dispositif des quatre vingt tableaux relève-t-il d’une programme d’improvisation, dans lequel les choses sont très cadrées au départ, pour pouvoir laisser libre court à une improvisation.

     

    Voilà comment naît un choix aussi « quantitatif » de peindre quatre vingt tableaux. Le but n’est pas le nombre pour la quantité. Le but est, à travers la quantité de ce nombre, de faire apparaître à la fois un vaste dessein par lequel transparaît un processus, et, à l’autre extrémité, de faire naître des situations sensibles, à une échelle sensible très fine, faisant apparaître des phénomènes que l’on peut apprécier en eux-mêmes, mais aussi comparer entre eux, et qui n’auraient pu être provoqués autrement. 

     

    Car j’ai éprouvé depuis longtemps la conviction que la peinture relève d’une phénoménologie intimiste, par laquelle des choses précieuses peuvent émerger, presque accidentellement, d’un travail de « dérive de la variation », au sein de laquelle la fraicheur de la sensation et de l’exécution est maintenue à vif, au maximum de son tonus. En fait, il conviendrait de chercher à maintenir le travail dans toute sa fleur, la vivacité première d’une capture d’un étonnement dans des choix instantanés sur les couleurs, les gestes, la facture, les contrastes, les accents, les effets… Car beaucoup de la qualité « heuristique » de la peinture se joue là.

     

    Donc c’est un choix à l’opposé d’un « dispositif » (ce mot est paraît-il importé de la stratégie militaire) conceptuel dans lequel tout est prévu et disposé à l’avance en vue de prendre prise et possession définitive d’un phénomène scénographique à travers par exemple une installation. Mon but était davantage de rencontrer des phénomènes que de les arraisonner ou de démontrer un propos exprimant littéralement un discours opératoire fermé.

     

    Je mettais plutôt en place un mode opératoire relativement strict, mais ce afin précisément de faire éclore des résultats rencontrés au fil du travail de la peinture ; celui, dans l’instant, de la sensation de voir et de faire avec les yeux, la tête et les mains, au travers de la matière et avec les outils sur un support… De la liberté de choisir d’accepter d’arrêter là le processus de peinture ou de le poursuivre.

     

    Je connaissais les protocoles minimalistes et conceptuels existant dans la production artistique des années soixante dix et je les aimais. Ils m’avaient, en quelque sorte, formé. Je savais comment des artistes ont anticipé le résultat de ce qu’ils souhaitaient faire. Sans doute d’ailleurs savaient-ils qu’ils devaient compter avec une part d’écart par rapport à leurs anticipations et qu’ils l’intégraient.

     

    Je cherchais de mon côté à provoquer et maintenir un état d’effervescence de l’inouï de la peinture, en tout cas pour moi-même. C’est-à-dire maintenir activé quelque chose pour être étonné, surpris, et amoureux de sensations fraîchement apparues que le dispositif avait fait éclore sous mes yeux au sein de l’action de peindre.

     

    Pour faire cela, je partais d’une solide formation de dessin académique qu’en quelque sorte je reniais par des « chromos »  assez naïfs mais propices à des ré interprétations. Et ceux-ci permettaient en retour de visiter des phénomènes de vibration de la touche, de sensualité et de couleurs, d’intimité à la sensation chromatique qui  m’attiraient.

     

     

    Variation ovale

     

    Variation ovale

     

    Joël Auxenfans. Objets d'un autre temps. Variation ovale. Série de 80 tableaux peints à l'huile sur panneau. 18 x 42 cm. 1998. (Détail)

     

    Je n’avais pas une formation académique en peinture à l'huile, mais je comptais à travers ce processus, acquérir quelque chose de l’ordre d’une expertise découverte par mes propres moyens, une pratique. Cette envie, un peu naïve, avait le mérite d’être habitée avec fougue, avec appétence. Et l’on retrouve ici l’orgie et l’ivresse.  Il y avait aussi probablement un besoin de rattraper une formation de peintre à l’huile qui m’avait manquée dans mes études, en mettant « les bouchées doubles ».

     

     

    Variation ovale

     

    Variation ovale

     

    Joël Auxenfans. Objets d'un autre temps. Variation ovale. Série de 80 tableaux peints à l'huile sur panneau. 18 x 42 cm. 1998. (Détail)

     

    L’appétit ne se limitait pas à « avaler » quatre vingt tableaux : j’envisageais sérieusement de procéder à une exploration complémentaire de variations en employant successivement trois techniques de gravure : lithographie, taille-douce, linogravure.

    Tout compris, on avait affaire à quelque chose comme 11 variations d’un même dessin au lieu de 8. Comme il y avait dix dessins différents, le nombre total s’élevait à 110 (10 x11) images.

    Ces images, il fallait alors les produire les unes après les autres. Ce nombre n’excédait pas mes capacités ni mon appétit, pourtant il demandait un travail réparti sur près d’un an, en 1998.

    Ce processus quasi scientifique d’expérimentation autorisait en retour une grande liberté dans l’art de la variation. Par exemple, une même image pouvait être traitée successivement de deux manières assez ressemblantes tout en étant dissemblables, puis, la fois d’après, passer à tout un autre type d’expression, considérant que toutes étaient légitimes, viables, finalement conformes à l’esprit du projet.

     

    C’est à une exploration des registres et des « humeurs » d’expression que j’aspirais. Il fallait vivre cette exploration pour lui faire libérer son potentiel de fécondité. 

     

     

     

    Variation ovale

     

    Variation ovale

     

    Joël Auxenfans. Objets d'un autre temps. Variation ovale. Série de 80 tableaux peints à l'huile sur panneau. 18 x 42 cm. 1998. (Détail)

     

     

     

     

     

     


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    La grotte

     

    Joël Auxenfans. Objets d’un autre temps. La grotte. Huile sur toile. 300 x 400 cm. 2000.

     

     

    Plusieurs facteurs m’ont conduit à la fin des années quatre vingt dix à vouloir réaliser une expérience de peintures à l’huile grand format. Celui de 300 x 400 centimètres faisait écho aux fameuses affiches de publicité imposées un peu partout dans l’espace extérieur ou celui du métro parisien. Je me suis dit que c’était le bon format.

    L’investissement des deux châssis, de la toile, des outils et de l’encollage nécessaires à la peinture de deux toiles de cette taille m’a valu aussi un travail sur deux années, parce que la tension des toiles la première fois était excessive et avait fait craquer ou se voiler les châssis pourtant en sections conséquentes de bois massif.

    D’efforts solitaires en déconvenues, je suis parvenu enfin à me mettre au travail d’après des maquettes peintes sur plus petit format. Pour peindre à plus de deux mètres, je m’étais confectionné une tour sur roulettes auto bloquantes, à base de palettes de chantier empilées les unes sur les autres. Un domaine viticole bio du Var, près du Muy, m’a laissé occuper pour mon « atelier  d’été » une vaste cuisine à l’arrière d’un espace de réception pour les mariages et banquets.

     

    A l’inverse des opérations purement commerciales et racoleuses des affiches trois par quatre de la publicité, je voulais produire une image de mystère, une allégorie qui rassemblerait tous mes désirs de peinture et de références classiques de l’art pour lesquelles je vouais une passion que l’on pouvait qualifier, pour moi qui n’avais pas la célébrité de Martial Raysse, de folle.

    Mais je m’acharnais à tenter cette aventure, qui n’avait ni commande, ni économie,… à part les miennes, et disons, l’économie de mon désir.

     

    En travaillant lentement d’abord le fond, puis l’ébauche, les modelés, les effets plus subtils de touche et de facture, de réponses entre formes et couleurs, je me prenais – qu’importe !- pour un peintre d’un autre temps. Je rassemblais tout le savoir d’une formation solide et relativement académique, et tout ce goût, cette attirance, cette gourmandise pour les techniques et les allures des peintures des maîtres anciens qui m’habitaient littéralement, pour une sorte de « chef d’œuvre ». Morceau de bravoure d’un quarantenaire qui se rejetait lui-même hors de la contemporanéité ?

     

    J’ai mis les moyens pour qu’un photographe de Marseille se déplace pour prendre en photo les toiles finies. Il manquait de recul pour ses réflecteurs, et cela produisit malgré ses efforts les reflets regrettables que l’on voit.

    Pendant que l’on effectuait les prises de vue, il me suggérait de penser à faire un film qui approcherait progressivement les détails de la toile pour en faire découvrir une narration au fur et à mesure. C’était une bonne idée mais je ne m’y intéressais pas suffisamment pour m’investir dans ce sens. C’était le « morceau » de peinture au sens académique qui visiblement m’importait, quelque chose que je voulais absolument prouver au monde, envers et contre tout, y compris à contre sens de l’histoire.

     

    J’ai utilisé ces photographies professionnelles pour postuler à la commission d’achat du Fonds National d’Art Contemporain (FNAC) de 2000 ou 2001, dans un choix suicidaire de vouloir exprès montrer quelque chose qui ne pouvait par définition être accepté autrement que de manière très paradoxale, comme « actuel ». Je comptais secrètement, je m’en souviens, sur la présence au jury de mon ancien camarade de classe en prépa Xavier Veilhan, devenu depuis une star officielle de la scène de l’art française et internationale. Manque de chance, en plus de demander beaucoup implicitement à cet ancien de ma promotion, lui qui ne partageait pas forcément ces goûts « rétrogrades », il s’avéra qu’il décida cette session-là précisément de « faire grève » de jury, réclamant  au même titre que les autres membres du jury, conservateurs et administrateurs de l’art contemporain fonctionnaires, d’être payé.

     

    Ma déveine était en quelque sorte à son comble, et délaissant cet atelier d’été, remontant vers Paris, j’ai depuis perdu la trace de ces travaux pourtant immenses et qui m’avaient coûté tant d’efforts.

     

    Depuis avec le recul de quinze années, je vois, tant dans le sujet, la mise en œuvre, que les éléments d’anecdote qui entourent ces deux toiles géantes, quelque chose de l’ordre de la volonté de me perdre dans un passé, l’enfance tout d’abord, à laquelle se rattache le sujet la Grotte qui correspondant à un souvenir vécu et réinterprété, mais aussi le passé en tant que refuge nostalgique.

    Or, si des auteurs littéraires ou des artistes ont su si magistralement accomplir leur œuvre littéraire en se basant en grande partie sur des souvenirs de leur vie passée, il n’a pas été question de resté piégé par un espace mental qui les plaçait  hors de leur temps.

     

    Je pense que ce travail sans visibilité – il n’a jamais été exposé, ni vu par plus d’une demi douzaine de personnes de passage dans l’atelier de fortune où je l’ai produit – se creusait une ornière qui rendait impraticable sa valorisation  dans le champ (au sens de Pierre Bourdieu) de l’art contemporain. Il mettait systématiquement les chances pas de son côté.

     

    Actuellement détruites ou dans un état lamentable,  montrer ces toiles sur Internet me semble peut-être la destination finalement la plus pertinente d’un travail dont la matérialité passéiste était très encombrante. C’est peut-être le souvenir de cette impossibilité matérielle à exister de la peinture « lourde » de passé qui me fait à présent destiner la plupart de mes peintures à devenir plutôt des matrice d’éditions d’affiches, qui, légères et remplaçables, sont collées à même la ville, loin du secret d’une antre reculée et mélancolique.

     

     

    Le rapport à l'intime, me paraît, directement ou de manière différée, primordial pour définir la peinture par rapport à d'autres moyens d'expressions plastiques tellement plus indirects et édictés par des critères conceptuels du bout en bout du processus de l'oeuvre. Ne serait-ce que par la relation au corps dans la pratique. Mais ce rapport à l'intime peut se retourner comme source de souffrance en même temps que de plaisir. C'est le paradoxe de l'art et de la beauté que d'être un pharmacon, c'est-à-dire autant un poison qu'un médicament. C'est le philosophe Bernard Stiegler http://pharmakon.fr/wordpress/ qui étudie très bien ces notions à propos de l'art et en particulier du cinéma.

    Les échecs sont aussi importants pour définir le travail ou la personnalité de quelqu’un. Comme Nassim Nicholas Taleb l’exprime très bien dans son livre « Le cygne noir, la puissance de l’imprévisible » paru aux Belles Lettres en 2008, il n’y a surtout pas que les réussites et les choses visibles qui permettent de se construire un jugement le plus juste de la réalité. Il y aussi tous les ratés, les disparus, les absents et les morts, ceux qui ne sont pas là pour témoigner, qui comptent et qu’il faut prendre en compte.

     

    Cela rejoint à sa façon le bel ouvrage du théoricien de l’art Hans Belting, intitulé « Le Chef d’œuvre invisible », aux éditions Jacqueline Chambon 2003, dans lequel on découvre combien les « à côtés » des œuvres, annonçant ou commentant celles-ci avant qu’elles soient vues ou même se substituant au fait qu’elles soient vues, sont largement contributeurs de l’ « image » des œuvres.

     

    Il y aurait un manuel des erreurs commises en art, par exemple, exposant les fiascos de tels ou tels artistes connus ou pas (peut-être surtout pas connus), qui apporterait une distance et une compréhension savoureuse, non seulement par l’éclairage de zones peu reluisantes de la carrière artistique de nombreux artistes (les plus nombreux en fait), mais aussi par la décompression qu’entrainerait chez les auteurs lorsqu’ils sont vivants, et aussi chez ceux qui étudieraient ces « revers », le fait de reparler à postériori de ces naufrages en espérant qu’avec le recul, on puisse rester vivant et à flot pour la suite…

     

    Il y a de la tendresse à se rappeler les moments d’errance, comme les amoureux se rappellent, lorsqu’ils se retrouvent ou sont encore ensemble, les maladresses réciproques et les malentendus de leurs débuts. Le temps passé est passé, les efforts vains ou naïfs ne l’étaient pas dès lors qu’ils entrent dans la constitution d’une expérience.

     

    Quant à la deuxième toile, intitulée « Tango », elle se rappelait un spectacle authentique de l’école de danse de La Havane, vu à l’occasion d’un passage dans la Drôme peu avant le passage au deuxième millénaire. Ces jeunes adolescent avaient quelque chose de touchant, mêlant le sens de l'instant et de la tradition perpétuée à leur extrême innocence, la composition que j'en avais faite les montraient, dans un rythme d'éclairages, comme allégorie de la fugacité de  l’existence et de la "visibilité" et la disparition irréversible dans le « hors champ » de la vie.

     

    Quel travail ce fut de peindre ces deux grandes toiles, quel bonheur aussi, et la suite faisait partie du processus…

     

     

    La grotte

     

    Joël Auxenfans. Objets d’un autre temps. Tango. Huile sur toile. 300 x 400 cm. 2000.

     

     

     

     


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